Mélissa Diawakana, coach indépendante de stars NBA !

Née deux fois, reconnue nulle part, mais aujourd’hui célébrée partout. Mélissa Diawakana a grandi dans l’ombre, sans papiers, sans nom vraiment d’elle. Aujourd’hui en fin de carrière de joueuse, en France, la jeune femme de 32 ans poursuit un début flamboyant d’une deuxième vie déjà bien entamée : celle de coach indépendante. Une trajectoire rare, puissante et unique. La sienne. PAR RUBEN DIAS. Extrait du WOMEN SPORTS AFRICA N°11.

Au cœur des grands gymnases, à l’ombre des projecteurs, là où l’on forge les champions, à l’écart du cœur et de rigueur, une silhouette agile et déterminée détonne : celle de Mélissa Diawakana. À 32 ans, elle est aujourd’hui la seule femme au monde à coacher de manière totalement indépendante des joueurs masculins professionnels, de la NBA à l’Euroleague. « Ce n’est que maintenant que je réalise à quel point c’est atypique », confie-t-elle, avec cette lucidité douce qui traverse son discours. « Sur le moment, je ne mesurais pas. Je faisais juste ce que j’aimais. »

Depuis cinq ans, ses sites sont rythmés par des sessions millimétrées avec Mehdy Ngouama, BuiKou, Serge Ibaka, DeWanna Bonner, Janelle Salaün, Nadir Hifi et tant d’autres. Son champ d’action va du drill sans détour : « C’est un entraînement individualisé, spécialisé. On est purement dans du technique, du tactique, en profondeur. On identifie avec le joueur ses besoins. C’est un travail sur mesure, pensé pour son contexte, sa carrière, sa saison. »

« Je voulais remplir un Olympia »

Cette vocation, pourtant, n’a rien d’un plan initial. À ses débuts, Mélissa rêvait d’un tout autre destin : « Je voulais devenir humoriste. Vraiment. J’avais même cette image en tête : remplir l’Olympia. » Le destin en a décidé autrement. Une mère à l’écart en qui, et cinq mois de silence ont changé sa vie. « J’ai vécu un placard total, c’était dur. Mais c’est là que tout a commencé. Je me suis demandé : si ce n’était pas une situation temporaire, si c’était une blessure définitive ? Qu’est-ce que je ferais ? »

C’est dans cet interstice de doute que naît l’élan. Seule sur le parquet, elle recommence à dribbler. À s’entraîner. Puis une coéquipière WNBA la repère. « Elle m’a dit : “J’adore ce que tu fais, viens on s’entraîne ensemble.” Et voilà. Tout est parti de là. »

« IL Y A TOUJOURS DES OBSTACLES, DES CHALLENGES AUXQUELS ON DOIT FAIRE FACE. »

Le bouche-à-oreille, l’excellence de son travail et sa vision claire font le reste. « Je n’ai jamais visé bas. Dès le départ, je voulais coacher des joueurs NBA, WNBA. Ce n’était pas un rêve fou, c’était un objectif. » Quand on lui demande ce qui fait sa force, elle évoque l’humilité du détail, l’apprentissage du vide. « Être mise au placard, ne plus compter, ça m’a permis de me détacher. Pour être un bon coach, il faut arrêter de se regarder dans le joueur. Il faut le voir, lui, tel qu’il est. Pas à travers nous. »

Cette capacité à s’effacer, à ne jamais juger, forge une relation rare avec ses athlètes. « Ils n’ont pas besoin de moi pour leur carrière. Ce sont déjà des grands. Mais si je peux les accompagner, leur apporter un regard différent, précis, alors je fais mon travail. »

Des rencontres inspirantes

Parmi les rencontres marquantes, elle évoque avec émotion Bui Koui, joueur sud-soudanais. « C’était juste après leur élimination aux JO. Il aurait pu s’effondrer. Au lieu de ça, il m’a appelée pour une séance. L’intensité qu’il a mise ce jour-là… C’était autre chose. Il travaillait comme si sa vie en dépendait. »

Son parcours n’a rien d’un conte de fée linéaire. Championne en Belgique, un passage au Mexique, une Eurocup en Israël, puis un retour aux bases avec le Stade Français pour financer son diplôme d’entraîneure… « Il a fallu que je monte toute ma structure. Que je joue encore un peu pour valider un projet. Ensuite j’ai arrêté. En 2022, j’ai eu mon diplôme. Et là, j’ai voulu voir si je pouvais vraiment vivre de ce que je faisais. »

Aujourd’hui, c’est chose faite. Son téléphone sonne. Ses sessions se remplissent. Les joueurs viennent, parfois de très loin, pour bénéficier de sa lecture du jeu, de sa précision. Et pourtant, elle garde la tête froide. Car l’ambition dépasse le parquet. « Mon rêve, ce n’est pas de voir des basketteurs réussir. Mon rêve, c’est que n’importe qui, une femme, un enfant, une maman, comprenne qu’il n’est jamais trop tard. Qu’on n’a pas besoin d’être né au bon endroit, ni d’avoir tout en main. Juste de croire que c’est possible. »

Par son parcours, Mélissa inspire. Pas seulement les champions. Mais tous ceux qui, un jour, doutent de leur place dans le monde. Parce qu’elle l’a vécue, cette mise à l’écart, cette invisibilité. Et qu’elle en a fait une lumière.

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