Mathilde Petitjean est une ancienne athlète de haut niveau en ski de fond qui a représenté le Togo dans plusieurs compétitions internationales, y compris les Jeux Olympiques. Aujourd’hui, elle est monitrice de ski de fond et mannequin sportif pour des marques de sport. Retour sur son parcours entre persévérance et adaptation. PAR VANESSA MAUREL. Extrait du Women Sports Africa N°6.
Née au Togo d’un père français et d’une mère togolaise, Mathilde a dé- ménagé en France à l’âge de quatre ans. Malgré la distance, elle a conservé un lien profond avec son pays natal. « Le Togo reste à la maison, même en France vu qu’on est toujours en train de manger des plats de là-bas (rires). On y retournait souvent avant la Covid, j’ai encore pas mal de fa- mille qui y vit. Ma mère parle le dialecte. Moi j’ai su parler, je ne le parle plus, je le comprends un peu. Mais dans tous les cas, on est quand même bien imprégné de cette vibe togolaise à la maison ! » raconte-t-elle à propos de ce double héritage culturel qui lui est cher.
Le ski : une évidence
Mathilde a découvert le ski de fond à l’âge de sept ans, une décision prise par ses parents pour canaliser son énergie débordante. « J’étais une jeune fille assez hyperactive. Aux alentours de 7 ans, mes parents se sont dit que ce serait une bonne idée de me mettre à un sport d’endurance pour me fatiguer. J’ai essayé avec l’école et ça m’a vraiment plu. En rentrant je leur en ai parlé tout de suite et du coup ils se sont dit que c’est là-dedans qu’on devait m’inscrire. J’ai commencé comme ça et je n’ai plus arrêté. J’ai vraiment adoré. » Dans le ski, Mathilde a en effet retrouvé tout ce qu’elle a aimé et aime encore : « un bon mélange d’être dans la nature, de dépassement de soi. C’est une belle école de la vie. » Vous l’aurez deviné, ce sport est vite devenu une passion, un espace où elle pouvait s’exprimer et se dépasser.
Commencer dans un club en France a été le point de départ de sa carrière compétitive. Cependant, c’est pour le Togo qu’elle a finalement choisi de concourir lorsqu’elle a eu l’opportunité de changer d’équipe, aux alentours de ses 19 ans. « Pouvoir le faire pour le Togo, c’était vraiment une belle expérience, même si c’était difficile. » En effet, représenter une petite fédération a exigé de Mathilde d’endosser plusieurs rôles : athlète, ma- nager, technicienne… « En arrivant dans cette petite fédération, c’était une façon pour moi d’écrire mon histoire, c’était une nouvelle page blanche. Il fallait aussi trouver des financements… Enfin, c’était un packaging. Soit tu prends tout, soit tu ne prends rien. » Mais autant dire que Mathilde n’a jamais regretté son choix. Bien au contraire.
Mathilde a eu l’occasion de porter le drapeau togolais à deux reprises lors des Jeux Olympiques : en 2014 et en 2018. Un moment de grande fierté. « Pendant quelques secondes, l’attention est vraiment braquée sur vous et là vous ne représentez plus uniquement votre personne mais tout un pays. Il y a énormément de fierté et en même temps il y a un peu de peur aussi, la peur de l’inconnu. On ne sait pas trop ce qu’on doit faire. » Cette expérience des Jeux, bien que gratifiante, a eu des répercussions importantes sur sa santé mentale. « Après les Jeux, c’est une grande chute libre, on se retrouve sans rien on va dire. » Mathilde a en effet vécu des périodes de dépression après chaque olympiade, et a mis du temps à se reconstruire en tant que femme et athlète.
Diplômée d’un master exécutif en management à l’emlyon
Concilier le sport et les études a égale- ment été un défi à relever. Durant ses années de collège, Mathilde s’entraînait les mercredis, samedis et dimanches. « Au lycée, il a fallu que je fasse un choix : j’ai décidé de partir en sport et études. » Post-bac, elle a poursuivi ses études à l’IUT du Mont-Blanc et a ensuite obtenu une licence professionnelle, tout en continuant à s’entraîner et à concourir pour le Togo.
Après avoir mis fin à sa carrière sportive internationale, Mathilde a décidé de continuer ses études pour préparer avenir. Elle a choisi l’emlyon, une école de commerce, où elle a récemment obtenu un master exécutif en management. Cette formation lui a permis de transférer les compétences acquises dans le sport de haut niveau au monde professionnel. « J’ai retrouvé ce côté sportif, un peu dé- passement de soi, la rigueur, la détermination, mais dans un tout autre domaine que le sport. », continue-t-elle. « Parce que j’ai passé trois ans de ma vie à être en cours le soir. Je continuais à travailler. À côté de ça, j’ai passé mon monitorat de ski. Je travaillais la journée, je donnais des cours de ski, je m’entraînais un peu. Je rentrais le soir. Là, j’avais des cours en visio. Après, des fois, il fallait que je reste plus longtemps pour travailler avec mes collègues d’entraînement. » Mathilde a directement été convaincue par l’école. « On a toujours un peu un suivi. C’est très cool parce que ça permet de ne pas lâcher. J’ai aussi adoré rencontrer des gens avec des profils complètement variés. Je ne savais pas du tout comment j’allais réagir au monde professionnel. Et ça, ça en était une. C’était vraiment bien de retrouver un peu les mêmes sensations. L’adrénaline, tout le reste. Quand tu es en examen, tu as la même adrénaline que quand tu es au départ d’une course. En tout cas pour moi, je le vis comme ça. Du coup, c’était vrai- ment bien de pouvoir transférer ce que je connaissais aussi du sport. »
Diplômée et riche d’une expérience variée, Mathilde recherche un emploi qui lui permettrait de combiner toutes ses passions. « Je n’ai pas encore trouvé un job où j’arrive à concilier toutes les facettes de moi-même. Je suis encore en train de chercher, mais je sais qu’il y a des domaines comme la mode qui m’attire énormément, le textile, le textile sportif, ça m’attire énormément. En plus, je suis dans le mannequinat, je me dis peut-être que j’irai là-dessus. Puis en même temps, le management, c’est ce que je fais aussi en tant que monitrice de ski… D’un autre côté je me dis j’ai envie de travailler aussi à l’étranger pour pouvoir encore mieux parler anglais… En fait, je reste un peu ouverte à toutes les opportunités. Je n’ai pas d’idée fixe encore. Je suis dans une période de ma vie un peu instable. Mais ce n’est pas mauvais d’être instable, parce que ça veut dire qu’après, on va peut-être retrouver une partie plus stable. Je l’espère du moins. »