Sur le stade, elle s’avance, toute menue, mais avec une présence qui occupe l’espace comme un soleil. Véronica Ndakara, 24 ans, n’est pas seulement une athlète paralympique, lanceuse de poids, de disque et de javelot. Elle est lanceuse de rêves, de rires et d’espoir, et ce dans une trajectoire ascendante qui brise les préjugés et dépasse les limites que d’autres avaient dessiné pour elle. PAR RUBEN DIAS. Extrait du Women Sports Africa N°10.
La jeune Centrafricaine porte drapeau de son pays lors des Jeux paralympiques de Paris 2024, a dû se battre pour devenir athlète. « Au début, ce n’était pas facile, parce que c’était ma première fois, je n’avais jamais fait de sport. Jamais, » raconte-t-elle avec un sourire nostalgique. « J’avais peur, je n’arrivais pas à m’adapter. »
Le sport, contre toute attente
Née avec un handicap de petite taille, Véronica a longtemps été privée des terrains de sport. À l’école, elle était systématiquement dispensée des cours d’éducation physique d’ailleurs. Mais cette barrière, elle l’a levée à 16 ans. « Je me suis dit que je ne pouvais pas continuer à croire que mon corps était une limite. Je devais apprendre à dépasser mes complexes, à suivre mes envies. » Et c’est ainsi qu’elle a pris la décision de plonger dans l’athlétisme, une discipline qu’elle n’avait jusque-là qu’effleurée du regard.
Depuis ce déclic, Véronica a gravi les échelons avec une constance qui force l’admiration. « Chaque étape est un ap– prentissage, chaque entraînement est une victoire sur moi-même, » dit-elle. En 2022, elle décroche une médaille d’or au javelot lors du Grand Prix de Marrakech, un exploit qu’elle réitère l’année suivante. En 2024, elle revient sur le même sol marocain et rafle une nouvelle victoire. « Mais tout ce que je sais, c’est que je ne suis pas encore là où je veux être dans ma carrière sportive, » confie-t-elle, les yeux brillants de détermination.
Une comédie pleine d’énergie
Si Véronica brille sur les stades, elle éclaire aussi les scènes. Car l’athlétisme partage sa vie avec une autre passion : la comédie. « La comédie, le cinéma, je suis dans ce monde ! J’aime trop ça, je suis accro ! » s’enthousiasme-t-elle. À Bangui, sa ville natale, elle est déjà une figure emblématique des web-séries locales. « Je donne du rire, je donne de la joie. Mon énergie positive, c’est ma force. »
Récompensée par un prix d’humour à Bangui, Véronica est une artiste née, qui trouve dans le jeu une façon d’exister au-delà de son handicap. « Je ne compte pas sur mon handicap pour attirer l’attention. Je veux qu’on me voie pour ce que je fais, pas pour ce que je suis censée ne pas pouvoir faire. » Une philosophie qu’elle applique sur scène comme sur le terrain.
Une inspiration sans détour
Véronica Ndakara est aussi une ambassadrice de la confiance en soi. « Pendant longtemps, je me suis réfugiée dans l’humour pour détourner l’attention de mon handicap, » avoue-t-elle. « Mais aujourd’hui, j’ai appris à accepter qui je suis, à être fière de ce que je fais. » Cette acceptation s’est traduite par des victoires personnelles et collectives, et par une notoriété qui inspire une génération de jeunes Centrafricains. Lors des Jeux paralympiques de Tokyo 2020, elle termine à la 9e place dans sa discipline. Puis 11e en lancer de poids à Paris en 2024. « Tout ce que je sais, c’est que je ne suis pas encore là où je veux être dans ma carrière sportive », prévient-elle.
Miss Centrafrique et agronome en herbe
Comme si jongler entre l’athlétisme et la comédie ne suffisait pas, Véronica pour- suit des études en agronomie. « La terre, c’est la vie. J’aime l’idée de nourrir le monde, » explique-t-elle simplement. Et pour ajouter une autre corde à son arc, elle a aussi été couronnée Miss Centrafrique dans une catégorie dédiée aux per- sonnes de petite taille.
Une trajectoire lumineuse
En athlétisme comme en comédie, Véronica Ndakara nous apprend que les limites sont souvent dans nos têtes, et que la plus belle victoire est celle que l’on remporte sur soi-même. Sous ses airs de légèreté, l’athlète prouve que la gravité est un concept à dépasser – qu’il s’agisse de lancer un poids ou de porter un rêve.