Dans l’univers carré des rings, où les cordes délimitent un espace de combat aussi intense qu’intime, Widad Bertal s’impose comme une étoile montante. À 25 ans, la boxeuse marocaine a déjà frappé fort, enchaînant les victoires et les titres avec une élégance brutale. Mais derrière chaque uppercut, derrière chaque direct du gauche – son geste fétiche – se cache une histoire. Celle d’une jeune femme dont la vie se joue autant dans l’adrénaline des rounds que dans la douceur d’un métier choisi avec cœur : infirmière diplômée en 2024, prête à soigner les corps quand viendra le moment de poser les gants.. PAR RUBEN DIAS. Extrait du Women Sports Africa N°10.
C’est son père, passionné de boxe, qui a ouvert à Widad les portes de cette discipline. « J’avais 12 ans, se souvient-elle. Il m’a inscrite dans une salle de boxe, et au début, je le faisais surtout pour lui faire plaisir. Mais très vite, j’ai accroché. Je me suis épanouie sur ce ring, et c’est devenu une passion partagée. » Cette complicité père-fille est aujourd’hui une source inépuisable de motivation. « Quand je gagne, la fierté dans ses yeux vaut toutes les médailles du monde, » confie-t-elle avec un sourire.
De cette relation, Widad a hérité non seulement d’une technique affûtée mais aussi d’une force mentale impressionnante. Car la boxe, plus qu’un sport, est une école de vie : « Elle m’a appris à encaisser, à rester debout malgré les coups, à me relever après une chute. »
Des poings qui parlent, des rêves qui brillent
Et les victoires de Widad ne sont pas que personnelles. Elles résonnent bien au-delà des frontières marocaines, inscrivant son nom au panthéon de la boxe africaine. Médaillée de bronze aux Championnats d’Afrique en 2022, elle décroche l’or l’année suivante à Yaoundé, puis aux Jeux panarabes et africains de 2023. En 2024, elle triomphe à Kinshasa, ajoutant une nouvelle étoile à son palmarès. Mais le point culminant de sa carrière reste sa qualification pour les quarts de finale des Jeux Olympiques de Paris, après un combat acharné contre la Thaïlandaise Juta- mas Jitpong, une adversaire redoutée.
« Quand on entre sur le ring, il n’y a pas de raccourci. Vous êtes face à votre adversaire, mais surtout face à vos peurs et à vos doutes. Et c’est là que vous trouvez votre véritable force. »
Un direct du gauche… et un détour par l’humanité
Si Widad Bertal frappe fort, c’est avec une précision calculée. À ses 1,75 m, elle exploite sa grande allonge pour dé- ployer son direct du gauche, son geste signature. « C’est une arme redoutable, admet-elle avec un éclat de malice. Il arrive plus vite que l’uppercut ou le crochet. C’est un coup efficace, mais aussi élégant. »
Cette élégance, elle la porte aussi hors du ring. Tout juste diplômée infirmière, elle s’apprête à embrasser une carrière d’infirmière lorsque sa carrière sportive prendra fin. « J’ai toujours voulu aider les autres, apporter du réconfort », dit- elle. Une douceur, presque en contraste avec l’intensité de son sport.
Une ambassadrice du rêve marocain
Pour Widad, chaque victoire est un message. Elle inspire des milliers de jeunes Marocaines à croire en leurs capacités, à rêver grand, à se battre pour leurs ambitions. « Je veux leur montrer que tout est possible, que peu importe d’où on vient, avec du travail et du cœur, on peut tout accomplir. »
Elle se considère comme une porte-voix pour celles qui, comme elle, n’osaient pas toujours rêver. « Le sport m’a appris la discipline, la confiance en moi. Je veux que chaque fille, dans n’importe quel coin du Maroc ou de l’Afrique, sache qu’elle peut atteindre les sommets. »
Un dernier round, un avenir radieux
Sur le ring, Widad Bertal est une combattante. En dehors, elle est une jeune femme avec des rêves simples : voyager, découvrir le monde, et un jour, ouvrir un centre de soins. « Ma vie est faite de contrastes : des coups puissants sur le ring, et des gestes doux dans la vie. Mais au fond, c’est toujours la même chose : donner le meilleur de moi-même. »
Son geste technique préféré
Le direct du gauche, comme je suis grande de taille ça rentre plus vite et plus fort que l’uppercut ou le crochet.